APELA

Association Pour l'Étude des Littératures Africaines

Littératures, Savoirs et Enseignement programme et résumés des interventions

Colloque International CELFA / APELA

 

Littératures, Savoirs et  Enseignement

 

 

Centre d’études linguistiques et littéraires francophones et africaines (Université Michel de Montaigne-Bordeaux 3) / Association pour l’étude des Littératures Africaines

 

23, 24, 25 septembre 2004

 

FLes débats se déroulent à la Maison des Sciences de l’Homme d’Aquitaine sur le domaine universitaire à Pessac (10, Esplanade des Antilles, 33607 Pessac)

 

Jeudi 23 septembre 2004, Maison des Sciences de l’Homme d’Aquitaine

 

8h 30 : Accueil des Congressistes

9h       Ouverture du colloque par le Président de Bordeaux 3, le Directeur de la MSHA, le Directeur du CELFA et le Président de l’APELA

9h30-10h30 : Conférence inaugurale : Professeur Sory Camara, Université Victor SegalenBordeaux 2

10h30-10h45: Pause

10h45-12h30 Ateliers

 

Les Savoirs dans la littérature (1)

Président : J. Riesz [Salle Jean Borde]

  Didactique des savoirs (1)

Président : J. Derive [Salle 21 – Salle Réunion 2 à l’étage]

 

Justin Bisanswa (Université de  Laval, Canada), « Roman africain et traversée des savoirs »

Anthony MANGEON (Université de Cergy-Pontoise) « L’écrivain noir et la maîtrise du savoir : les stratégies discursives et institutionnelles de A. Leroy Locke et V.Y. Mudimbe »

Denise Coussy (Université  Le Mans), « L’évolution du thème du savoir dans les romans africains anglophones »

Bernard MOURALIS (Université de Cergy-Pontoise) « Passion et savoir dans les romans d’Abasse Dione et Daniel Biyaoula »

 

 

Ursula Baumgardt (INALCO/LLACAN) « De la  ‘pédagogie’ des contes »

Alain RICARD (CNRS/LLACAN) « édition, traduction, enseignement : le rôle nécessaire de la philologie dans l’enseignement  des  littératures de  l’Afrique »

Kusum Aggarwal (Univ. New Delhi), « Les Paradoxes de l’africanisme colonial : l’exemple de l’Institut Français d’Afrique noire »

Flora Veit-Wild (Université de Humboldt, Allemagne) « Les études de la littérature africaine – défi ou défaut ? »

 

 

12h30-14 h : Déjeuner libre (lieux de restauration signalés sur le plan du Domaine Universitaire)

14h-16h : Ateliers

 

Les Savoirs dans la littérature (2)

Président : M. Borgomano [Salle Jean Borde]

  Didactique des savoirs (2)

Président : M. Ngalasso [Salle 21 – Salle Réunion 2 à l’étage]

– Joséphine Mulumba(Univ. de Bayreuth) « L’écriture de l’Université chez Ngandu Nkashama »

Isaac-Célestin TCHEHO (Université de Yaoundé, Cameroun) « La sagesse au cœur du “mbooku”, poésie traditionnelle du Cameroun Septentrional »

– –Pierre FANDIO (Université Buea, Cameroun), « Pouvoir du savoir et stratégies d’exclusion, la place de la femme dans les manuels d’apprentissage des langues officielles au Cameroun »

Richard SAMIN (Université de Nancy 2) « Es’kia Mphahlele : un  ‘ pédagogue incorrigible’  »

János Riesz (Université de Bayreuth) « Le savoir colonial dans les littératures africaines »

 

 

Madeleine MBONJI-MOUELLE (ENS, Cameroun), « Littératures et Enseignement: Les Pratiques de Lectures dans les classes anglophones du Cameroun »

Sandrine Lemaire (Assoc. Connaissance de l’Histoire de l’Afrique Contemporaine) « Visions d’Afrique à travers les manuels scolaires français »

Katell ThébaUdeau (Université de Laval, Canada), « Pédagogie du roman et roman de la pédagogie »

Jean SEVRY (Université de Montpellier) « Études africaines et interdisciplinarité : réflexions théoriques et retour sur des pratiques »

 

 

 

16h15-18h15 : Ateliers

 

Les Savoirs dans la littérature (3)

Président : B. Mouralis  [Salle Jean Borde]

  Didactique des savoirs (3)

Président : A. Ricard [Salle 21 – Salle Réunion 2 à l’étage]

 

Véronique Diane Assi  (Université de.Cocody-Abidjan, Côte d’Ivoire), « Littérature et anthropologie dans l’œuvre d’Amadou Hampate Bâ : L’étrange destin de Wangrin »

– Viviane Azarian  (Univ.Paris III-Sorbonne la Nouvelle) « Refus d’un « enseignement au rabais ». Table-rase et reprise de la formation dans La savane rouge de F.D. Sissoko »

Suzanne GERHMANN (Université Humboldt, Allemagne) « Du Moi au Nous ? Les pratiques autobiographiques de Ken Bugul »

Janina Wozniak (Univ. Port Elizabeth, Afrique du Sud), « Savoir, souvenir, superstition ou discours collectif? Quelques fissures dans des identités post-apartheid de charactères sud-africains dans les films A Reasonable Man (1999) et The Day of the Two Suns (1999) »

 

 

Sophie Moulard-Kouka (Université Bordeaux 2), « Le Rap à Dakar : un discours populaire et didactique ‘entre local et global’

– Cristina Pugliese (Université de Molise, Italie) « Italian Translations of African Literature: Can they be used in  the Classroom ? »

Flavia AIELLO (Université de la Calabre, Italie), « Le Nouvel enseignement de littérature swahilie à l’Université de Cosenza : un compte rendu (année 2004) »

 

 

18h30 Rencontre avec Kangni Alem, Grand prix littéraire de l’Afrique Noire 2003 pour Cola Cola Jazz [Salle Jean Borde]

 

Dîner libre

 

Vendredi 24 septembre 2004, Maison des Sciences de l’Homme d’Aquitaine

 

9h – 11h Ateliers

 

Savoirs de la littérature / Savoir des écrivains (1)

President : J. Sevry [Salle Jean Borde]

L’Enseignement des Littératures Africaines (1)

Président : D. Coussy [Salle 21 – Salle Réunion 2 à l’étage]

 

Madeleine Borgomano (Univ. Aix-en-Provence)

« Femmes, école, savoirs : vers une nouvelle configuration représentée (ou préfigurée) par quelques romans récents »

Mwamba Cabakulu (Université Gaston Berger, Sénégal), « L’adaptation en question dans le cinéma africain .L’exemple de Guelwaar d’O. Sembène : du film au roman »

Mary HARVAN-GORGETTE (Université de Dayton, Ohio), « Que veut dire « Ken Saro-Wiwa »? L’évolution de l’image de l’écrivain engagé, 1994-2004 »

– Mélanie Bourlet (INALCO) « Discours politique et poésie pulaar dans les années 70 et 80 au Sénégal et en Mauritanie »

 

Marie-Rose Abomo-Maurin  (LLACAN) « La littérature africaine et francophone dans le programme de français des lycées français »

Christiane Albert (Université de Pau) « Entre contextualisation et pluralité des modèles de lecteurs : l’enseignement des littératures africaines hors de leur contexte de production »

Christiane Chaulet-Achour (Université de Cergy-Pontoise) « L’enseignement d’un classique de la décolonisation : Les Damnés de la terre de Fanon d’un côté et de l’autre de la Méditerranée. Étude comparée de deux stratégies pédagogiques »

Tunda Kitende-Ngoy (Université du Botswana) « L’évolution de l’enseignement de la littérature africaine d’expression française en Afrique orientale et australe »

 

 

11h-11h15 Pause

 

 

11h15-12h30 Ateliers

 

Savoirs de la littérature / Savoir des écrivains (2)

Président : M. Abomo-Maurin [Salle Jean Borde]

L’Enseignement des Littératures Africaines (2)

Président : V. Coulon [Salle 21 – Salle Réunion 2 à l’étage]

 

– Lydia MARTEL (Université de Laval) « L’Harmonisation esthétique des savoirs dans le roman africain : Tierno Monénembo, Henri Lopes et Boubacar Boris Diop »

– — Boniface Mongo-Mboussa (Université Paris XIII) « Savoirs et pouvoirs dans l’œuvre d’Emmanuel Dongala »

Rondro RAVANOMANANA (Univ. de la Réunion / Univ. d’Antananarivo, Madagascar) « étude d’un genre : la nouvelle malgache en question(s) »

-Richard Djiropo (CELFA) « Regard sur A. Hampâté Bâ ; le passeur du savoir à la croisée de deux mondes »

 

Elena Bertoncini (Université de Naples, Italie), « L’enseignement de la littérature swahili en Italie »

Florence MOYART (Université Lille III) « La faillite de l’éducation primaire (ou familiale) dans le corpus postcolonial »

A. Mbuyamba Kankolongo (Univ. Kinshasa, RDC), « L’enseignement des littératures africaines a l’université congolaise : bilan et perspectives »

Vanessa VAUDIN (Université de Cergy-Pontoise) « L’enseignement des littératures francophones dans le secondaire »

Jean-Norbert Vignonde (CELFA) « Pour une didactique de la parémiologie:le cas des littératures africaines du golfe du Bénin »

 

12h30 : Cérémonie en l’honneur de Jack Corzani [Salle des Actes de l’Université Michel de Montaigne-Bordeaux 3] suivi d’un déjeuner libre

 

14h-16h : Assemblée Générale de l’APELA [MSHA – Salle Jean Borde]

 

16h15-18h15 : Ateliers

 

Savoirs de la littérature / Savoir des écrivains (3) Président : J. Bisanswa [Salle Jean Borde]   Quête des Savoirs / Transmission des Savoirs (1)

Président : E. Bertoncini [Salle 21 – Salle Réunion 2 à l’étage]

 

– Selom GBANOU (Université de Bayreuth) « Exil et savoir : la place de l’autre dans Pelourinho de Tierno Monenembo »

Laté Lawson-Hellu (Univ. Western Ontario, Canada) « Écriture et discours social dans les littératures africaines : éléments d’un paradigme postcolonial »

– Alain Sissao (Institut des Sciences des Sociétés / Centre National de la Recherche Scientifique et Technologique du Burkina Faso)  «L’Expression des savoirs dans la littérature burkinabè »

Nazaré TORRAO (Université de Genève) « Entre les traditions et le quotidien vécu – les frictions d’un monde en mutation »

 

 

 

 

Abdellah HAMMOUTI, (Faculté de Lettres, Oujda, Maroc),  « La Représentation de l’école dans le roman africain d’expression française »

– Mahougnon KAKPO (Univ  d’Abomey-Calavi, Bénin), « Le Fa comme vecteur de savoirs littéraires »

Paul KERSTENS (Université de Bayreuth) « Des journalistes-romanciers et des romanciers-journalistes » : La dialectique du fictif et de l’histoire dans les récits du génocide au Rwanda »

– David N’GORAN (Université de Cergy-Pontoise) « Du griot, du chasseur et de l’initié » :Étude sur quelques figures du savoir dans la littérature africaine »

 

 

20h00 Banquet du Colloque : dîner-croisière à bord de l’Aliénor

 

 

 


Samedi 25 septembre 2004, Maison des Sciences de l’Homme d’Aquitaine

 

9h – 11h Ateliers

 

 

 

 

Didactique des savoirs (4)

Président : T. Kitenge-Ngoy [Salle Jean Borde]

 

  Quête des Savoirs / Transmission des Savoirs (2)

Président : C. Albert [Salle 21 –Salle Réunion 2 : étage]

 

Celeste Pinto Costa Martins (Univ. Lisbonne), « Présence anglo-américaine dans le panorama littéraire des Iles de Cap-Vert – enseignement des savoirs dans les cycles secondaires et universitaires »

– Clarisse Dehont (Univ. Laval, Canada), « Image de l’Afrique dans la littérature belge : le recyclage éternel d’un savoir tronqué »

Catherine MAZAURIC (Université Toulouse Le Mirail) « Appropriation linguistique et lecture littéraire : pour une didactisation de l’extrême contemporain africain, en Afrique et ailleurs »

Philip Whyte (Université de Tours) « La littérature comme instrument pédagogique : le roman populaire ghanéen et l’œuvre d’Ayi Kwei Armah »

 

 

 

Margarita Garcia Casado (Université de Cantabri, Espagne), « Entre l’école, la maison et la cité : la quête identitaire des jeunes beurs »

Parfait DIANDUE (Université de Limoges) « Le Ventre de l’Atlantique : métaphore aquatique d’un mirage:idéal brisé de l’Ailleurs ? »

Véronique CORINUS (Univ. Paris IV-INALCO), « L.S. Senghor, pédagogue: l’oralité africaine au service de l’écrit en français »

Priscilla Appama-Reschmi ( Université de Cergy-Pontoise) « Savoir et frontières : Nurrudin Farah, Salman Rushdie, Lindsey Collen »

Mari Carmen SERRANO BELMONTE (Université d’Alicante, Espagne), « La richesse de la magie naturelle dans la littérature antillaise »

 

 

11h – 12h30 Séance plénière de clôture : Table Ronde sur l’enseignement des littératures africaines en Europe et an Afrique (animée par Alain Ricard)

 

 

 

La Littérature africaine et francophone dans le programme de français des lycées français

Marie Abomo-Maurin (LLACAN)

 

Depuis quelques années, le programme des enseignements du français inclut des auteurs francophones à l’étude pour des élèves des lycées. Les problèmes rencontrées sont nombreux.

Il s’agit tout d’abord de la connaissance même du monde francophone. Les difficultés émanent aussi de l’approche des textes mêmes, des aspects culturels qu’ils véhiculent. Quels sont les enjeux l’insertion de ces auteurs dans l’univers du lycéen français ?

 

 

Les Paradoxes de l’africanisme colonial : l’exemple de l’Institut Français d’Afrique Noire

Kusum Aggarwal

(Department of Germanic and Romance Studies, Delhi University)

 

 

« La constitution d’une science africaine est bien une exigence de notre politique coloniale ». La création de l’I.F.A.N, à la veille de la Deuxième Guerre mondiale, correspondait en effet à la nécessité qu’évoquait Albert Charton, inspecteur général de l’enseignement colonial, de construire un savoir légitime au sujet des territoires français de l’Afrique sub-saharienne. Fait d’expérimentations solitaires des chercheurs zélés, il fallait certes à l’africanisme français un encadrement institutionnel susceptible de rallier à la fois les chercheurs occidentaux et leurs homologues africains au service d’une science configurée selon une perspective fondamentalement occidentale.

Cette étude se conçoit pour l’essentiel comme un questionnement sur le statut et le fonctionnement de la recherche menée sous l’égide de l’IFAN dans le but d’apporter une réflexion sur ses fondements historiques et épistémologiques. Car, doublement marqué, ce haut lieu de la vie scientifique et artistique africain eut à faire face non seulement à une vision idéologique des sociétés et des cultures africaines, mais aussi à des méthodes et des approches héritées pour l’essentiel des sciences de la nature. Notre lecture de la trajectoire de l’africanisme fera donc appel à quelques figures notoires : Théodore Monod, Amadou Hampâté Bâ, Vincent Monteil, George Balandier, Cheikh Anta Diop

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Le Nouvel enseignement de littérature swahilie à l’Université de Cosenza: un compte rendu (année 2004)

Flavia Aiello Traore (Univ. de Cosenza, Italie)

 

L’enseignement de la littérature swahilie n’est pas répandu au niveau académique en Italie: jusqu’à l’année 2003 il paraissait seulement dans le choix didactique de l’Université de Naples “L’Orientale”, où j’ai obtenu la maîtrise en Langues et Civilisations Orientales avec un mémoire sur le roman Utengano de S.A. Mohamed, et en suite le doctorat avec une thèse sur la poésie chantée taarab à Zanzibar, toujours sous la direction de mon professeur de Langue et Littérature Swahilie, Madame E. Bertoncini. Cette année-ci, toutefois, quelque chose a changé: à la Facultè de Lettres de l’Université de Cosenza, une ville en Italie du sud, on m’a confié un cours de Langue et Littérature Swahilie. Dans ma communication je vais présenter cette première expérience didactique, en soulignant les difficultés et les sollicitations qui ont surgi dans un contexte universitaire où des enseignements orientalistes viennent à peine d’être activés (arabe depuis deux ans, swahili et japonais à partir de 2004), enseignements qui se trouvent en plus dans une position très marginale dans les parcours d’études linguistiques occidentalistes. L’effort principal consiste à adapter à la formation et aux exigeances des étudiants le matériel didactique existant et l’organisation du cours comme je l’ai experimenté moi-même, et le domaine le plus critique s’est révélé être surtout l’enseignement de la literature. En 2004 j’ai présenté un projet du cours et par la suite, grace à mon expérience des leçons données, je me suis proposée de le modifier, en introduisant des changements pour améliorer l’enseignement de la littérature swahilie dans ce nouveau contexte universitaire.

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Entre contextualisation et pluralité des modèles de lecteurs :

L’enseignement des littératures africaines hors de leur contexte de production.

Christiane ALBERT (Université de Pau)

L’enseignement décontextualisé des littératures francophones nécessite en premier lieu de s’interroger sur l’appareil critique habituellement utilisé dans l’analyse des textes européens (perspectives narratologiques, énonciatives, structuralistes et autres). Ces méthodes d’analyses se révèlent en effet insuffisantes pour rendre compte de la spécificité des littératures francophones et de leur situation de plurilinguisme et pluriculturalisme qui implique des éléments stylistiques, thématiques et narratifs spécifiques qui ne peuvent s’appréhender qu’en se référant à un contexte particulier. Cela implique-t-il pour autant que la littérature africaine ne soit déchiffrable que par des gens issus d’un même groupe culturel ? Cette lecture ne risque -t-elle pas aussi d’enfermer la lecture de l’œuvre africaine dans une perspective trop particularisante ?

Le fait de privilégier le pôle de la production du texte laisse en effet de côté le pôle de la réception de l’œuvre, sans prendre suffisamment en compte le fait que chaque œuvre construit dans le texte son modèle de lecteur. Compte tenu de la situation de la littérature africaine, ce modèle n’est pas univoque et la pluralité de modèles de lecteurs appelle une pluralité de lectures possibles. Dans le cas d’une lecture décontextualisée ce n’est pas la connaissance des faits de culture ou de société en amont de l’œuvre qui permettent une lecture fructueuse de l’œuvre. C’est l’œuvre elle-même qui devient instrument de savoir et de connaissance d’une autre culture bien que certains particularismes culturels puissent rester « opaques » pour un lecteur occidental. Cela ne veut pas dire qu’il faille décontextualiser l’œuvre de son environnement culturel et social, mais, au contraire, qu’il faut admettre ces éléments particularisants comme des éléments intraduisibles qui attestent de ce que Segalen appelait « le divers ».

 

 

Savoir et frontières

Priscilla Appama-Reschmi (Université de Cergy-Pontoise)

A travers l’étude de trois auteurs (Nuruddin Farah : Territoires, Salman Rushdie : Les enfants de minuit, Lindsey Collen : The Rape of Sita et Misyon Garson) j’essaierai de montrer comment ces écrivains « postcoloniaux » tente de redonner vie à la parole ancestrale/traditionnelle, porteuse d’un savoir souvent oublié, nié, opaque ou encore inconnu de l’Autre, en déterritorialisant les diverses frontières (linguistiques, culturelles, temporelles, topographiques,…). Loin d’être des « diseurs de vérité » ou « détenteurs de la parole initiatique » au sens strict du terme, ils essaient de donner une version de ce savoir, de fabriquer ou de reconstituer un savoir et ainsi d’augmenter la somme de ce qu’il est possible de penser de/sur ces sociétés (« postcolonies ») dont ils parlent dans leurs romans. Ce faisant, ils donnent aux « postcolonisés » la possibilité de se penser enfin comme sujet de l’histoire, capable de se penser différemment (donc, de se reconstruire une identité) et de produire des « histoires » (les récits alternatifs) et un Savoir…

 

Littérature et Anthropologie dans l’œuvre d’Amadou Hampâté Bâ: intertextualité et fonctionnement dans la formation d’un savoir anthropologique. étude de cas: l’étrange destin de Wangrin et l’éclat de la grande étoile

Véronique Diane Assi (Université d’Abidjan)

 

Il s’agira d’étudier une pratique d’écriture, celle d’Hampâté Bâ et d’examiner la manière dont le texte littéraire est porteur d’un savoir anthropologique à déterminer, re/fabrique ce savoir à partir notamment du paratexte (appareil de notes essentiellement), le transmet et l’organise. Montrer comment le roman par exemple, en se réappropriant ce savoir tend à lui-même un discours anthropologique chargé au delà de la littérarité du texte d’ancrer celui-ci dans un réel sue lequel le détenteur de ce savoir, tient à avoir prise.

 

 

Refus d’un « enseignement au rabais », table rase et reprise de la formation dans La savane rouge de F .D.Sissoko

Viviane Azarian (Univ.Paris III-Sorbonne la Nouvelle)

 

Dans La savane rouge, texte autobiographique publié en 1962, F. D.Sissoko raconte sa formation à l’école coloniale et les difficultés qu’il y rencontre, liées à sa lecture trop « politique » des textes au programme.

Les remarques blessantes de ses professeurs, les humiliations subies, dont l’échec à l’examen de sortie de l’école W. Ponty, seront dépassées grâce à la rencontre avec l’administrateur F. Froger avec qui l’auteur aura l’occasion de reprendre et d’approfondir sa formation.

C’est à ce « maître à penser » que F.D.Sissoko dédie son récit, celui qui lui a permis de convertir une « parole autoritaire » en « parole intérieurement persuasive » ; et d’élaborer un syncrétisme personnel, un savoir sur lui-même et sur les autres. Ainsi La savane rouge peut-elle être lue comme récit de formation, Bildungsroman, et comme dénonciation politique qui met en lumière les contradictions du système scolaire colonial.

C’est sous ces deux aspects que je me propose de l’étudier.

 

 

De la « pédagogie » des contes

Ursula Baumgardt (INALCO/LLACAN)

 

L’un des lieux communs les plus souvent exprimés à propos des contes est celui de leur « fonction pédagogique ». On s’intéresse ainsi au message et à l’enseignement dispensé par un genre– simple en apparence.

Cette approche est elle-même simplificatrice, car elle ne prend en compte que le seul niveau du contenu.

S’il est vrai que de nombreux contes formulent une conclusion explicite, ils disposent, comme tout genre littéraire, de procédés de représentation du monde qui interviennent à tous les niveaux du texte et qui participent de la formulation du savoir. D’où la question qui sera traitée dans la communication : quels sont les procédés spécifiques aux contes en contexte d’oralité pour transmettre du savoir ?

 

 

 

L’Enseignement de la littérature swahili en Italie

Elena BERTONCINI (Université de Naples, Italie)

 

Je voudrais présenter la littérature swahili du point de vue des étudiants italiens, en parlant de mon expérience à l’Université de Naples (l’Orientale) où je tiens la chaire de Langue et littérature swahili. J’enseigne le théâtre (2e année), le roman (3e) et la poésie classique et moderne (4e). La poésie est le seul genre littéraire qui a une longue tradition écrite en swahili. La poésie classique a attiré l’intérêt de chercheurs européens dès le 19e siècle, donc la plupart des études littéraires s’est concentré sur elle. Par contre, les étudiants s’y passionnent très rarement. Ils préfèrent la poésie moderne en vers libre, surtout les poèmes de Kezilahabi qui a introduit ce type de poésie en swahili dans les années ‘70. Dans le cours de théâtre aussi, ils choisissent souvent une pièce de Kezilahabi, tellement critique du gouvernement du président Nyerere qu’elle a pu être publié seulement vingt ans plus tard. Par contre, parmi les romans et nouvelles les oeuvres préférés sont ceux des auteurs zanzibarites. En bref, nos étudiantS apprécient surtout les textes qui traitent des problèmes communs à jeunes gens du monde entier.

 

 

Roman africain et traversée des savoirs

Justin K. Bisanswa (Université de Laval, Canada)

 

Comme on sait, le roman africain se veut une énorme et méthodique exploration de la société française, animée d’un souci d’inventaire et de classification. Je montrerai que l’art du roman ne se veut pas innocent miroir, quoi qu’en ait dit Stendhal. S’il se réclame intensément d’une vérité, il maintient des notions telles que celles de vision et d’écran, qui supposent à la fois regard personnel de l’écrivain et représentation réfractée. Il est, par exemple, attention à tout le contexte matériel et culturel qui entoure les êtres et les définit. Ce qui implique une sensibilité au monde dans ce qu’il a de plus concret et de plus effectif. Je voudrais interroger l’érotisme de la théorie dans le roman africain, c’est-à-dire montrer comment le roman institue un commerce incessant entre la théorie et la fiction. J’examinerai ainsi l’irréductible d’un style dont l’humour et les connotations textuelles dépassent constamment les besoins de l’exposition théorique, problématisant cette exposition par une sorte de surcharge ironique à travers laquelle la « théorie » se démystifie comme savoir, mais se joue, en revanche, comme désir de la théorie. C’est cette complexité vitale, cet irréductible excès rhétorique de l’énonciation sur le simple énoncé, ce constant pervertissement littéraire de la transparence théorique; le fait que la théorie, elle aussi, se joue par le biais littéraire. L’écriture romanesque représente donc une traversée de la scène philosophique, des sciences humaines et sociales

 

 

Femmes, école et savoirs : vers une nouvelle configuration ?.

Madeleine Borgomano (Université d’Aix-en-Provence)

 

Dans les romans africains des vingt dernières années, l’école occidentale et son savoir, désormais adoptés, sont pourtant fortement dévalorisés. Aux problèmes de scolarisation succèdent ceux de la déscolarisation. “ Le régiment des déscolarisés ” (Kourouma) pose un dramatique problème politique et social. Les « aventures ambiguës » ont pris une forme moins tragique (Transmission) et sont devenues surtout affaires de femmes. Ce sont des femmes, souvent instruites, qui posent autrement les questions des conflits des savoirs (T. Boni, F. Diome, C. Beyala, K. Bugul) et pas seulement dans des romans de femmes (Dongala). Des femmes surtout qui résolvent ces conflits par l’action sans s’enfermer dans des oppositions binaires ni dans une recherche de l’absolu, en inventant des formes dynamiques et ouvertes de réconciliation.

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Discours politique et poésie pulaar dans les années 70 et 80 au Sénégal et en Mauritanie

Mélanie Bourlet (INALCO, Paris)

 

Mamadou Sammba Diop, Ibrahima Sarr, Seydou Nourou N’Diaye, Mountaga Diagne… Rares sont ceux parmi les locuteurs du pulaar, au Sénégal, en Mauritanie ou en France, à ne pas avoir déjà lu, entendu, déclamé ou fredonné leurs poèmes. Cette communication, tout en cherchant à présenter 4 poètes célèbres dans leur communauté d’origine, s’attache également à montrer la dimension politique de ces poèmes : appel à la révolution dans les campagnes du nord du Sénégal, cris de militants opprimés lors des évènements mauritaniens. La poésie pulaar dans un contexte politique agité va devenir le genre privilégié d’un message culturel fort, pas toujours dénué d’idéologie.

 

 

L’Adaptation en question dans le cinéma africain. L’exemple de Guelwaar d’O. Sembène : du film au roman

  1. Mwamba CABAKULU (Université Gaston Berger, Saint-Louis, Sénégal)

 

Dans le débat sur la notion d’influence entre la littérature et le cinéma africains, on constate que le cinéma francophone, dans son ensemble, ne recourt guère à l’adaptation littéraire dans le choix de ses scénarios. Les cinéastes préfèrent des scénarios originaux alors que, de l’adaptation, peuvent se révéler des points d’enrichissement réciproque inestimables. O. Sembène fait exception à cette règle : nombre de ses films sont des adaptations de ses romans et nouvelles (La Noire de.., Niaye, Mandabi, Xala, Niiwam...) Cependant, contrairement à l’opinion courante selon laquelle adapter, c’est transposer un livre à l’écran, le concept d’adaptation revêt un second sens, à savoir le schéma inverse lorsqu’un écrivain tire tire un roman d’un film. C’est dans ce schéma que s’est illustré Sembène avec son roman Guelwwar (Paris : Présence Africaine, 1994,163 p.), tiré de son film éponyme. Célèbre par sa démarche de rupture, ce roman emprunte au film le titre, l’intrigue, la situation des personnages, le dialogue, le traitement spatio-temporel et autres procédés d’expression. O. Sembène définit lui-même cette nouvelle voie comme étant une « bigamie créatrice ». Ainsi, en partant sur les traces du film, le livre constitue une version nouvelle de cohérences. Le « sens » du film devient une « signification » dans le roman. Et cette pratique se vérifie comme porteuse d’une esthétique nouvelle qu’il s’agit d’élucider dans sa création intertextuelle.

 

 

L’enseignement d’un classique de la décolonisation : Les Damnés de la terre de Frantz Fanon. D’un côté et de l’autre de la Méditerranée. étude comparée de deux stratégies pédagogiques

Christiane CHAULET ACHOUR (Université de Cergy-Pontoise)

 

Ayant eu l’opportunité d’enseigner l’œuvre de Frantz Fanon d’un côté et de l’autre de la Méditerranée (Alger-Caen et Cergy), il me semble intéressant de réfléchir à la manière dont un « savoir » aussi incontournable que celui que propose F. Fanon sur la décolonisation n’est pas transmissible de la même manière selon le contexte général et universitaire du pays où l’on exerce. Ma démonstration s’appuiera sur l’ensemble de son oeuvre : les trois essais (Peau
noire, masques blancs
/ L’An V de la Révolution algérienne / Les Damnés de la terre) ainsi que des articles regroupés dans Pour la Révolution africaine.

 

 

L.S. Senghor, pédagogue: l’oralité africaine au service de l’écrit en français

Véronique CORINUS (Université Paris IV- INALCO)

 

En 1953, LS. Senghor rédige un manuel de lecture destiné aux jeunes africains qui fréquentent le cours élémentaire : La belle histoire de Leuk le Lièvre. Pour amener les écoliers à maîtriser le français parlé et écrit, il a paradoxalement recours aux contes traditionnels et à l’un des leurs personnages privilégiés. Mais c’est là l’unique concession faite à l’oralité. L’économie du texte oral, ses enjeux, ses procédés, tout est modifié afin que l’enfant puisse accéder à la langue française et à la culture qu’elle véhicule. Face à ce manuel récemment réédité, s’engage une réflexion sur le traitement équivoque de la littérature orale dans une perspective éducative.

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L’évolution du thème du savoir dans les romans africains anglophones

Denise Coussy (Paris)

 

Les premiers romans anglophones datent des années 60 et reflètent l’attraction que l’école des missionnaires a, pendant toute la colonisation, exercée sur les écoliers, leurs parents et leurs maîtres. L’éducation est alors perçue comme « une Toison d’or » ou comme « un passeport pour la richesse et le pouvoir ».

Mais, peu à peu, les romanciers ont été amenés à mettre en question la validité de ce savoir importé et à prendre comme protagonistes des jeunes gens qui récusent l’école et deviennent, peu à peu, des laissés pour compte guettés par la déchéance et, même, par la folie.

En contrepoint de ces phénomènes très négatifs de rejet, de nombreux textes vont se tourner vers une réhabilitation du savoir ancestral qui a réussi à perdurer au sein d’une acculturation prononcée. Les romans vont alors proposer des voyages magiques au bout de la forêt (Tutuola) ou des odyssées oniriques et « enchantées » (Ben Okri) . Les porte parole des écrivains vont, eux, devenir des « guérisseurs » aux remèdes immémoriaux (Armah), des conteurs émérites dépositaires de l’Histoire de leurs peuples (Achebe et Farah), des femmes qui disent leurs douleurs de se savoir exploitées (Hove) et, même, des esclaves d’antan qui parviennent à maîtriser la science moderne. Dans ces textes d’une grande beauté formelle l’apologie du savoir réussit à être à la fois didactique et politique, contemporaine et prophétique.

 

 

Le Stéréotype de l’Africain dans la littérature belge

Clarisse DEHONT (Université de Laval, Canada)

 

Depuis l’accession du Roi Léopold II au titre de souverain de l’État indépendant du Congo, au XIXe siècle, et principalement à partir de l’annexion de ce pays à la Belgique en 1908, les autorités belges ont mis en place tout un système de propagande visant à justifier leur présence sur le territoire africain. Véhiculée jusqu’à 1960, date de l’indépendance de la colonie, cette image officielle de l’Afrique noire, dans laquelle le Blanc est mis en scène comme une figure indispensable, a également trouvé écho dans divers médias dont la littérature et la bande dessinée, favorisant ainsi l’apparition et la transmission de stéréotypes concernant le Congo et ses habitants, assimilés au continent africain dans son entièreté. Notre projet de recherche vise à analyser l’image stéréotypée de l’Afrique noire telle que véhiculée dans la littérature et la bande dessinée belges francophones au XXe siècle. Ces médias permettent en effet un recyclage presque infini de ce stéréotype. De plus, après 1960, si le discours officiel a changé, les préjugés, eux, perdurent. Ils prennent d’autres formes, apparaissent (parfois) de façon moins flagrante à la surface du texte mais le signifié culturel auquel ils renvoient reste inchangé. Par une étude comparative de Bass-Bassina-Boulou, de Franz Hellens, écrit en 1920, de Tintin au Congo (1930), du Coup de lune, de Simenon (1932), du Reste du monde d’Anna Geramys, édité en 1987, ainsi que de La Trinité Harmelin de Jacques-Gérard Linze, publié en 1990, nous tenterons de voir sous quelle forme le stéréotype de l’Africain se manifeste dans la littérature belge et surtout, comment il s’est perpétué malgré le changement de discours officiel.

 

 

Le Ventre de l’Atlantique : métaphore aquatique d’un mirage:idéal brisé de l’Ailleurs?

Parfait Diandué (Université de Limoges)

 

Il s’agira de montrer comment Fatou Diome utilise l’esthétique de la déconstruction pour rendre compte de manière didactique des tumultueux rapports d’immigration qui lient l’Afrique à l’Occident. Dans son roman, l’auteur met en confrontation le discours romanesque fictionnel, le discours historique et le discours socio-politique actuel tenus sur l’immigration et ses conditions. Cette inter-discursivité qui fait se côtoyer l’Ethos et le Pathos met en avant par le biais d’une narration sarcastique et d’un ton persifleur les scories de l’immigration et les turpitudes d’une histoire cachée dans la coopération européo-africaine. La métaphore de l’atlantique qui établit ce lien a une double orientation axiologique. D’abord elle brise le mythe de l’Ailleurs-paradis et l’image  de l’idyllique Occident puis elle pourfend et stigmatise l’hypostase des immigrés qui au contraire de leurs conditions miséreuses en Europe, vivent des jours royaux en Afrique. Il nous revient donc de montrer comment Fatou Diome use de la déconstruction comme moyen didactique et comment elle entreprend cette double déconstruction qui induit une esthétique de la Décontruction. Sa démarche procède pour ainsi dire d’une double intentionnalité d’abord rompre et désarticuler le mythe de l’Ailleurs, puis noyer l’hypostase des immigrés dans l’imagerie populaire d’une Afrique en détresse.

 

 

Regard sur A. Hampâté Bâ ; le passeur du savoir à la croisée de deux mondes

Richard Djiropo (CELFA, Université Michel de Montaigne-Bordeaux 3)

 

  1. Hampâté Bâ aura consacré sa vie à la défense de la culture africaine. La transmission de ce savoir ne se fait plus ni au travers du « bois sacré » ni dans un coin de la case d’un Vieux, mais dans un espace-classe. L’enseignement n’est plus oral mais scriptural. La parole n’est plus initiatique, saisissable selon le degré d’entendement de l’apprenant, mais donnée dans son essence. Cette parole n’est plus un outil, une clef, devant servir à construire son monde et le Monde, une invitation à l’ expérimentation personnelle, mais la connaissance est trans-mise, donnée. Un apprentissage qui n’ plus découverte mais accumulation. Le savoir n’est plus proverbial, métaphorique, allégorique, symbolique dans son énonciation mais rationalisant dans une logique discursive et explicative. Le savoir « nouveau » ne nie-t-il pas le savoir des anciens ? Nous sommes, là, à la croisée de deux mondes quant aux modes de transmission et à la vision portée sur le contenu. Comment percevoir A. Hampâté Bâ à la croisée de ces deux mondes ? A la formulation de la thématique « Littératures, savoirs et enseignement » ne faudrait-il pas, avec Hampâté Bâ inverser la proposition en ces termes : « Savoir, enseignement et littératures » ?

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Pouvoir du savoir et stratégies d’exclusion : la place de la femme dans les manuels d’apprentissage des langues officielles au Cameroun

Pierre FANDIO (Université de Buea, Cameroun)

 

L’étude se préoccupe de la qualité du discours sur et par la femme diffusé par les manuels de 1’enseignement de I’anglais et du français sur les deux berges de la Mungo River, de l’indépendance du Cameroun à nos jours. Elle explique comment l’école, espace institutionnel de socialisation équilibrée des citoyens en devenir qu’elle prend en charge, devient, par la dissémination insidieuse des textes misogynes, le lieu même de la distribution du pouvoir machiste. La société de référence apparaît dès lors comme le type même de la société androcentriste car elle utilise – sans doute inconsciemment – les mécanismes idéologiques et institutionnels pour perpétuer la marginalisation de la femme. »

 

 

Entre l’école, la maison et la cité : la quête identitaire des jeunes beurs

Margarita Garcia Casado (Université de Cantabri, Espagne)

 

A travers quelques œuvres représentatives de la littérature « beur », cette étude se propose d’analyser la complexité et l’évolution des relations existant entre les jeunes issus de l’émigration et les figures traditionnellement perçues comme détentrices du savoir, la cellule familiale face au savoir institutionnalisé de la société d’accueil à travers la figure de l’enseignant.

Les auteurs choisis pour cette étude mettent en évidence la complexité de la situation à laquelle doit s’affronter le jeune maghrébin devenu l’enjeu de plusieurs transmetteurs de savoirs qui de par leur manque de communication et les abîmes qui les séparent vont l’acculer, dans certains cas, à des situations extrêmes de non retour.

Nous verrons dans un premier temps, à travers Le thé au harem d’Archi Ahmed de Mehdi Charef et Georgette ! de Farida Belghoul, comment la non conciliation entre le savoir traditionnel, représenté par la cellule familiale, et le système éducatif de la société d’accueil, un savoir qui constitue paradoxalement une extension de la violence subie par les populations émigrées, va conduire les jeunes à une impasse.

Alors que l’école et en particulier la réussite scolaire séparent encore le jeune de sa communauté, Azouz Begag, dans Le Gone du Chaâba, montre que l’école constitue aussi un lieu de rencontre où peut s’amorcer le dialogue entre deux communautés jusque-là séparées. À la vision négative de l’enseignant dressée par les deux premiers auteurs, Begag oppose la figure d’un professeur qui non seulement apprendra au jeune « Azouz » les valeurs et la langue de la société d’accueil où il vit, mais lui enseignera aussi cette Algérie qu’il n’a jamais connue.

Shérazade de Leïla Sebbar montre enfin que la transmission du savoir n’est plus la prérogative de l’enseignant ni de la famille et que cette dernière est prise en charge par les jeunes eux-mêmes. À travers les personnages de Shérazade, jeune beurette qui n’a jamais connu le pays d’origine de ses parents, et de Julien, français originaire d’Algérie pour qui la France constitue paradoxalement une terre d’exil, Sebbar montre que le dialogue est possible mais que l’échange des savoirs s’effectue en marge des créneaux traditionnels. Ce texte de Sebbar révèle que les jeunes ne sont plus des récepteurs passifs mais qu’ils font preuve d’une attitude sélective et critique face à des savoirs qui exacerbent leurs différences et continuent de nier ce qui les rattache.

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Exils et savoir : la place de l’autre dans Pelourinho de Tierno Monénembo

Sélom Gbanou (Université de Bayreuth, Allemagne)

 

De par sa fortune dans la littérature, à la fois comme thème et comme contexte de production, l’exil est devenu un mythe des temps modernes tant on ne sait plus très bien à quelle réalité il renvoie. Dans le domaine des littératures africaines, il constitue un mode de représentation du Moi de l’exilé, de l’immigré par rapport au pays d’origine et au lieu choisi. Situation d’un entre-deux géographique, culturel, esthétique dont l’écriture tire grand profit. L’objectif de ma communication est de montrer, à partir du roman Pelourinho (Seuil, 1995) de Tierno Monénembo, comment l’exil – qu’il soit voulu ou subi – est ou peut devenir une école de soi et de l’altérité où le voyage, l’errance, la solitude constituent un chemin de retour à Soi.

 

Du Moi au Nous ? Les pratiques autobiographiques de Ken Bugul

Susanne GerHmann (Humboldt-Universität zu Berlin)

 

Depuis Le babobab fou qui fut jadis jugé scandaleux, Ken Bugul a continué à élaborer un discours autobiographique dans une série de textes, aujourd’hui au nombre de quatre. Dans le cadre des discussions autour du statut de l’autobiographie en Afrique, il est intéressant de constater, que Ken Bugul part d’un Moi radicalement singulier dans son premier texte pour se rapprocher à l‘énonciation d’un nous communautaire dans les textes suivants. L’écriture devient progressivement un lieu d’expression non seulement du Je autobiographique, mais des histoires multiples des femmes sénégalaises et des membres de sa famille. Le discours scientifique occidental a souvent jugé le collectif comme essentiel dans les sociétés africaines ; de ce fait, une construction du Moi ne serait possible qu’à l’intérieur des liens communautaires. Je voudrais analyser la démarche littéraire de Ken Bugul qui renverse cette perspective en montrant comment elle construit une communauté qui semble absent au début de son projet autobiographique, mais remplit progressivement une fonction identitaire pour le Je parlant ; fonction qui s’avère cependant problématique et n’efface nullement l’individualité. Il s’agit donc de l’étude d’un cas d’écriture autobiographique africaine qui contredit les savoirs reçus contenus dans certaines approches sociologiques des littératures africaines.

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La Représentation de l’école dans le roman africain d’expression française

Abdellah HAMMOUTI (Faculté des Lettres Oujda, Maroc)

 

L’école a toujours été considérée comme un moyen de réussite sociale dans les pays africains (Afrique subsaharienne et Maghreb). Qu’il s’agisse d’école coranique ou d’école moderne, l’émancipation du citoyen commence avec l’alphabétisation. Mais si l’école coranique était d’abord perçue comme un lieu de formation spirituelle et de culte (on y apprend la parole de Dieu), les méthodes d’enseignements qu’elle utilisait ont souvent été critiquées. De même, le rôle de l’école moderne était au départ vu de manière ambivalente ; elle était à la fois une rivale de l’école traditionnelle et une institution qui pouvait assurer l’avenir du citoyen. Les représentations que donne le roman de l’école varient évidemment d’une période historique à une autre et d’un auteur à un autre, mais le rôle qu’elle joue dans la vie de l’enfant est gravé à jamais dans sa mémoire ; la preuve en est ce grand nombre de récits autobiographiques ou à caractère autobiographique qui se sont succédé. Nous nous limiterons ici à l’analyse de quelques-uns qui serviront d’illustration : L’Enfant noir de Camara Laye, L’Aventure ambiguë de Cheikh Hamidou Kane, Les Bouts de bois de Dieu d’Ousmane Sembène, Le Fort maudit de Nafissatou Diallo, La Boîte à merveilles d’Ahmed Sefrioui, Le Fils du pauvre de Mouloud FERAOUN, La Grande maison de Mohamed Dib, Le passé simple de Driss Chraïbi, La Statue de sel d’Albert MEMMI et La Mémoire tatouée d’Abelkébir KHATIBI..

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Que veut dire « Ken Saro-Wiwa » ? L’image de l’écrivain engagé, 1994-2004

Mary Harvan-Gorgette (Université de Dayton, Ohio)

 

Dix ans après sa dernière arrestation, que peut-on dire de l’image de Ken Saro-Wiwa, l’écrivain et l’homme engagé ? Comment son œuvre littéraire a-t-elle été reçue parmi ses lecteurs et ses critiques ? Y-a-t-il un consensus sur son statu d’écrivain ? Le souvenir de cet homme, a-t-il influencé la lutte politique et économique que Saro-Wiwa a menée avec ses compatriotes, les Ogonis du Nigéria ? Son image, a-t-elle continué à jouer un rôle dans leur mouvement après la mort du leader en 1995 ? Quant au gouvernement nigérien et aux sociétés pétrolières qui ont été pris pour cibles par le mouvement Ogoni, comment ont-ils utilisé l’image de Saro-Wiwa ? Mon projet de recherche trace d’abord l’évolution de l’image de Saro-Wiwa à travers les critiques littéraires, la presse internationale, les textes officiels du gouvernement nigérien, et les campagnes publicitaires de Shell Oil. Il analyse ensuite cette image aux aspects multiples. En résumant cette analyse, la communication vise à énumérer les significations de « Ken Saro-Wiwa » bientôt dix ans après sa mort.

 

 

Le Fa comme vecteur de savoirs littéraires

Mahougnon KAKPO (Univ.d’Abomey-Calavi, Bénin)

 

Fa est l’un des systèmes de divination pratiqués en Afrique occidentale, notamment dans l’ancien Empire du Bénin (le Nigeria dont la ville Ifè a donné le nom Fa, l’actuel Bénin et le Togo), et embrasse l’essentiel de la mythologie des peuples qui le pratiquent. Son efficacité lui vient surtout de son rattachement à un temps jamais achevé. Il s’agit d’un essai de répétition du temps originel, celui du cycle d’événements où la communauté trouve sa justification et son fondement. En d’autres termes, le monde présent est une sorte de représentation en miniature de ce qui s’est passé dans le temps mythique et ce que l’homme y fera ne sera qu’une exécution de sa destinée. L’homme rejoint donc par l’accomplissement des rites l’univers de l’être. Fa est le pont qui unit le temps des origines au temps profane. A travers ses mythes et légendes, Fa fournit à l’homme des modèles exemplaires pour une existence décente dans un monde désaxé.

L’objectif essentiel de cette étude est de montrer comment Fa, à travers ses Du ou signes cardinaux, recèle la quasi totalité des genres littéraires. Aussi le Bokonon est-il non seulement un interprète des savoirs, mais surtout un interprète de savoirs littéraires. Il s’agira surtout, à partir des unités de base, des atomes narratifs présents dans chaque Fa Du, de répondre, à l’instar de Roman Jakobson, à la question de poétique : Qu’est-ce qui fait d’un message verbal une œuvre d’art ?, Autrement dit, en quoi le Fa Du est-il une œuvre littéraire ? Jakobson a répondu à cette interrogation en disant qu’il s’agit de la littérature d’où s’origine un formalisme. Quant à ce qui nous concerne, nous nous inscrirons plutôt dans la perspective suggérée dans Pour la poétique I où Henri Meschonnic invite à « Considérer l’œuvre comme une forme unique, un système orienté, qui est le résultat d’une création par un sujet et qui est l’objet d’une lecture pour un autre sujet : Ce qui est à chercher, ce sont les lois de ce système .». Peut-être cette perspective nous aidera-t-elle à soutenir que Fa est une Parole littéraire, en particulier une Poésie totale.

 

 

 

Des journalistes-romanciers et des romanciers-journalistes : La dialectique du fictif et de l’histoire dans les récits du génocide au Rwanda

Paul KerstENS (Université de Bayreuth, Allemagne)

 

A côté de la littérature scientifique abondante sur le génocide au Rwanda, un sous-genre populaire s’est développé combinant la fiction et l’histoire. Ainsi, des journalistes professionnels s’aventurent à la fiction, comme est le cas pour Gilles Courtemanche (Un dimanche à la piscine à Kigali) et Hans Christoph Buch (Kain und Abel in Afrika). Cependant, il est plus courant qu’un des deux genres acquiert des caractéristiques de l’autre : la fiction du journalisme (par ex. L’ombre d’Imana de Véronique Tadjo, Rwanda ’94 de Groupov, Beminde schurken de Aster Berkhof) ou le journalisme de la fiction (par ex. Dans le nu de la vie de Jean Hatzfeld, De doden zijn niet dood de Els De Temmerman, We wish to inform you that tomorrow we will be killed with our families de Philip Gourevitch). Par conséquent le statut du texte et la position de son auteur ne sont pas toujours clairs et univoques.

 

 

L’évolution de l’enseignement de la littérature africaine d’expression francaise en Afrique orientale et australe

Tunda KITENGE-NGOY (Université de Botswana)

 

La plupart des universités d’Afrique orientale et australe ont entrepris ces dernières années la révision de leurs syllabus d’études françaises. De nouvelles filières de formation et de nouveaux enseignements ont été mis en place à cause de l’intérêt économique qu’ils représentent. En conséquence, la question des objectifs de l’enseignement du Français est posée : celle-ci peut difficilement se limiter à des objectifs d’ordre purement culturel et devrait être pensé dans la perspective de la formation des cadres, des transferts de technologie, des relations internationales. La conception des syllabus devrait donc s’effectuer dans une perspective hardie et très démarquée de l’approche traditionnelle. Il convient donc de se demander si l’étude de la littérature francophone est pertinente et cadre avec les impératifs de développement et la politique nationale tels que définis par les gouvernements respectifs. On est tenté de répondre par la négative à cette question. Il va donc sans dire que l’étude de la littérature ne peut représenter une fin en soi que pour un petit nombre d’étudiants qui voudraient ultérieurement se spécialiser dans cette discipline. Pour la grande majorité des autres étudiants, l’objectif doit être plus pragmatique et par conséquent davantage orienté vers une pré-professionnalisation.

On peut rétorquer que l’université a des standards à respecter mais encore faut-il s’en donner les moyens, or le moyen principal est bien la maîtrise de la langue dans laquelle on reçoit un enseignement théorique, faute de quoi l’on s’expose à une compréhension très approximative des matières enseignées et à des performances très insuffisantes lors des examens. L’importance de l’étude de la littérature africaine ne devrait donc pas être surévaluée relativement aux objectifs utilitaires de l’apprentissage du français. Elle devrait au contraire être en conformité avec les objectifs du développement d’un pays donné.

Les contenus des examens et des programmes de littérature africaine d’expression française des universités d’Afrique orientale et australe répondent-ils à cette attente ?

 

 

 

Écriture et discours social dans les littératures africaines : éléments d’un paradigme postcolonial

Laté Lawson-Hellu (Univ. Western Ontario, Canada)

 

Le constat de « L’Afrique va mal », illustré par le titre polémique de l’ouvrage de René Dumont, L’Afrique est mal partie, demeure, et ce, dès le début de l’entreprise coloniale, le mot d’ordre de la modernité africaine, celui, du moins, de ses discours sur le social et de ses solutions au mal, en d’autres termes, celui de ses fondements discursifs, idéologiques. Inspirée d’un ouvrage à paraître, la présente réflexion fait de ce constat le point hégémonique d’un Discours Social africain à penser, qui informerait les référents normatifs et axiologiques des productions culturelles de l’Afrique moderne, à commencer par la littérature et sa tradition d’engagement. L’exploration des conditions de validité d’un tel paradigme critique, mais aussi heuristique et foncièrement postcolonial, se fonde sur l’analyse de deux romans africains, l’un de la période coloniale, L’Esclave, de Félix Couchoro, l’autre, de la post-colonie, Les Méduses ou les orties de mer, de Tchicaya U Tam’si.

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Visions d’Afrique à travers les manuels scolaires français

Sandrine Lemaire (Asso. Connaissance de l’Histoire de l’Afrique Contemporaine)

 

L’étude du regard porté sur l’Afrique et les Africains dans l’enceinte du monde scolaire est essentielle pour comprendre la construction à la fois de l’altérité mais aussi de l’identité dans le cadre européen. Or cette construction a, et est largement diffusée via les manuels scolaires qui constituent aujourd’hui de formidables outils de recherche pour saisir les progrès, mais aussi les permanences, des discours officiels. En effet, il est intéressant dans cette communication d’appréhender l’évolution de l’enseignement portant sur l’Afrique entre la période coloniale et aujourd’hui, afin d’y déceler les permanences, les ruptures, les changements de perception ou encore réticences – qu’on discerne aisément – à reconnaître à l’Afrique et aux Africains, une histoire, une littérature, une culture en un mot. En s’attachant au texte aussi bien qu’aux images, nous verrons donc combien les stéréotypes d’hier nourrissent encore bien des préjugés d’aujourd’hui, même si un certain nombre de tendances encourageantes se dessinent

 

 

L’écrivain noir et la maîtrise du savoir : les stratégies discursives et institutionnelles d’Alain Leroy Locke et de Valentin-Yves Mudimbe

Anthony Mangeon (Université de Cergy-Pontoise)

 

Le sujet que je te propose pourrait s’intituler : « L’écrivain noir et la maîtrise du savoir : les stratégies discursives et institutionnelles d’Alain Leroy Locke et de Valentin-Yves Mudimbe ». Je voudrai en effet comparer leurs démarches dans un cadre historique, transatlantique et interdisciplinaire, et montrer comment ces deux écrivains ont contribué à élaborer une pratique discursive nouvelle et un nouveau type d’enseignement pluridisciplinaire, à la croisée de la littérature, des sciences sociales et de la philosophie. Il s’agira d’expliciter chez eux une double stratégie, à la fois de maîtrise de la forme et de déformation de la maîtrise, qui leur permet, sur le plan intellectuel, de participer à un changement de paradigme ou à une rupture épistémologique, tandis qu’elle rend possible, sur le plan institutionnel et militant, une meilleure indexation de la théorie sur la pratique et, sur le plan existentiel, de vivre leur statut d’intellectuel noir, non plus comme un oxymore, mais comme un paradoxisme, c’est-à-dire une double postulation (comment être à la fois le plus intellectuel, ie le plus ancré dans une tradition objective à prétention universaliste, et le plus noir, ie le plus fidèle possible à une expérience historique collective mais néanmoins singulière). Mon exposé s’inscrit principalement dans les axes poétique et sociologique du colloque, sans négliger pour autant l’axe pédagogique ; il se situe à la fois dans le domaine américain et dans le domaine africain, mais dans une perspective unificatrice.

 

L’Harmonisation esthétique des savoirs dans le roman africain :

Tierno Monénembo, Henri Lopes et Boubacar Boris Diop

Lydia MARTEL (Université de Laval, Canada)

 

Cette communication présentera quelques interférences entre les « savoirs » et les « littératures » en analysant l’œuvre de Tierno Monénembo, Henri Lopes et Boubacar Boris Diop selon un axe poétique. Il s’agira de montrer, d’une part, quelques-uns des savoirs que ces auteurs refabriquent et transmettent à leur tour dans leurs romans sous une forme adaptée à la postmodernité et, d’autre part, les modalités de cette mise à jour. Nous verrons, notamment, que les savoirs des aires culturelles africaines et européenne, autrefois plus ou moins divergents, convergent et s’harmonisent de plus en plus chez les personnages qui en sont porteurs. L’écriture relayant les traces de savoirs traditionnels et modernes dans les domaines de la médecine, de la psychiatrie, de l’ethnologie ou de la religion, certaines connaissances autrefois transmises par l’initiation subsistent dans les œuvres littéraires sous des formes inédites. Tous ces savoirs sont, en effet, utilisés librement par les romanciers qui puisent tant dans le champ d’un savoir décloisonné que dans celui de l’imaginaire pour reconfigurer le réel, la société et leur propre identité. Dans l’énonciation de cette reconfiguration, se trouvent les éléments d’un savoir essentiel, dans une forme de transcendance qui, seule, permet la fusion de conceptions préalablement conflictuelles. Nous porterons attention au discours de cette énonciation par laquelle se produit l’harmonisation esthétique des savoirs.

 

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Présence anglo-américaine dans le Panorama littéraire des Iles de Cap-Vert – enseignement des savoirs dans les cycles secondaires et universitaires

Celeste Pinto Costa Martins

 

On ne peut pas parler de la présence Anglo-Américaine dans le panorama des îles de Cap-Vert sans faire mention à la situation géographique de cet archipel qui se trouve à 500 Km de la côte africaine, dans la zone Soudano-Saharienne, de climat aride. Les îles sont situées dans le croisement des routes de grandes lignes de navigation entre l’Europe, l’Amérique, l’Australie, les Océans Pacifique et Indien. Cette convergence confère à l’archipel une valeur exceptionnelle.

Les États Unis et la Grande Bretagne ont donné aux îles une ouverture internationale dés le XVIIIe siècle. L’émigration et la migration persistantes ont laissé des traces sur la vie économique, social, culturel, linguistique et littéraire.

Baltazar Lopes da Silva (philologue, essayiste poète et écrivain), Corsino Fortes, Teixeira de Sousa, António Aurélio Gonçalves, Félix Monteiro et d’autres racontent les rapports de souffrance et drame de ceux qui partent, ceux qui retournent et ceux qui restent. Les lexèmes utilisés quelques fois par ces auteurs reflètent cette présence Anglo-Américaine.

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Appropriation linguistique et lecture littéraire : pour une didactisation de l’extrême contemporain africain, en Afrique et ailleurs

Catherine Mazauric (Université de Toulouse Le Mirail)

 

Les conclusions publiées des récents États généraux de l’enseignement du français en Afrique subsaharienne francophone (Libreville, mars 2003) s’inquiètent à bon droit du « désintérêt croissant des élèves à l’égard de la langue française », soulignant chez ces derniers un sentiment d’insécurité linguistique « profond », et appellent dès lors à un enseignement allant « dans le sens d’une simplification des usages et des pratiques », fondé sur l’établissement d’une norme endogène. On relève cependant que, dans le temps même où la nécessité d’une « véritable appropriation du français », en articulation avec les langues africaines, est fortement rappelée, la représentation qui s’en impose est celle d’un outil efficace, en phase avec la modernité, tandis que rien n’est dit des textes littéraires et de leur place dans l’enseignement. Bref, les finalités paraissent plus instrumentales qu’éducatives.

Bien sûr, une telle approche résulte tout à la fois de la situation de crise évoquée, et de la répartition des emplois entre les langues, nationales ou d’enseignement. Cependant, on peut se demander si une démarche visant à une authentique appropriation peut faire l’impasse, notamment dans le second degré d’enseignement, sur les stratégies identitaires des sujets dans toute l’étendue de leur répertoire linguistique, langue « seconde » incluse. Or ces démarches, si elles peuvent trouver à s’alimenter dans les « pratiques culturelles populaires » telles que « théâtre, chanson, bande dessinée » préconisées par ces mêmes États généraux, passent aussi par la lecture de textes littéraires, comme le rappelait Nimrod dans son Tombeau de L. S. Senghor. On observe d’ailleurs que, nonobstant des obstacles matériels considérables, les textes littéraires persistent à occuper dans l’enseignement du français en Afrique, au moins dans le second degré, une position dominante, où la place occupée par la littérature en train de se faire reste cependant, comme en France, marginale. Qu’il s’agisse en outre des savoirs linguistiques ou des savoir-faire discursifs à acquérir, ils constituent un objectif commun aux publics de français, langue maternelle ou première, et langue seconde : pour les uns comme pour les autres, la langue visée n’est pas celle de la communication ordinaire, et l’élaboration d’une compétence discursive demeure un processus long et complexe.

Pour l’ensemble de ces apprentissages, l’extrême contemporain africain des années 90-2000, où nous associerons des textes de fiction narrative et de rap, nous paraît constituer un terrain particulièrement riche, en Afrique francophone comme en France. Nous nous appuierons notamment sur deux romans d’Emmanuel B. Dongala (Les Petits garçons naissent aussi des étoiles et Johnny chien méchant) et des récits d’Aminata Sow Fall et de Fatou Diome (dont son tout récent Ventre de l’Atlantique), ainsi que sur des textes des rappeurs sénégalais Positive Black Soul, Daara J et Djoloff. Les premiers, qui mettent en œuvre une langue et une écriture à distance de la norme académique, constituent des récits de quête de savoirs et d’apprentissage à différents égards, entre Afrique et Europe, tandis que les seconds pratiquent tant l’alternance codique wolof-français que le samplage du canon littéraire négro-africain. Nous réfléchirons, à partir de ces textes, sur différents dispositifs didactiques où les objectifs d’une lecture littéraire ne se limitent ni à des connaissances référentielles, ni à des savoirs exclusivement littéraires.

 


 

Littératures et Enseignement : Les Pratiques de Lectures dans les classes
anglophones du Cameroun

Marie-Madeleine C. Mbonji-Mouelle (ENS, Cameroun)

 

Au Cameroun en général et dans les classes anglophones en particulier, l’articulation Lecture/Enseignement des littératures est très peu développée. L’objectif du présent travail est d’abord d’étudier la nature et les conditions de l’ enseignement des littératures dans le cadre spécifique du secteur scolaire anglophone camerounais, à travers la mise en évidence des rapports des pratiques de lectures des élèves à cet enseignement; et ensuite, montrer comment on peut, en Français Langue seconde II, favoriser l’acquisition des savoirs, Savoir-faire et Savoir-être en développant chez les apprenants anglophones le goût de la lecture des textes littéraires sous toutes les formes. Après avoir interrogé le dispositif didactique en place en ce milieu scolaire dans l’enseignement des littératures:leur place, l’état des bibliothèques scolaires, de bibliographies, etc.,.. le constat qui s’en dégage est l’inculture quasi notoire des élèves par rapport au fait littéraire; En effet, cet enseignement demeure restrictif et archaïque car rien n’est fait pour inciter à la culture de la lecture. Plusieurs questions se posent: comment améliorer, chez ces élèves anglophones du Cameroun, l’acquisition d’une compétence autonome dans la langue écrite et orale par des pratiques abondantes et non coercitives des extraits ou des oeuvres littéraires? Cette dimension nous semble assez essentielle pour appréhender toute la complexité d’une situation de communication en classe de littératures. Qu’elles lectures pour quels Savoirs en littérature? à travers quels supports? et avec quelle méthodologie? L’autre dimension est que la mise en place d’une compétence autonome des textes  chez des africains va servir comme base d’exploration des différences culturelles dans le sens de Kramsch, pour mieux modeler la personnalités et l’argumentation des apprenants.

 

L’enseignement des littératures africaines à l’Université congolaise:bilan et perspectives

d’avenir

Alphonse MBUYAMBA Kankolongo (Université de Kinshasa, R.D.C.)

 

Dans chaque secteur de la vie humaine, il arrive toujours un moment donné où l’on doit s’arrêter et procéder à une sorte de bilan. Au vu du thème retenu par l’APELA pour son prochain colloque, c’est l’occasion que je souhaite saisir pour m’interroger sur l’enseignement des littératures africaines à l’Université congolaise en établissant un état des lieux:comment celles-ci sont-elles transmises? Quel développement a connu leur pratique?Quelle a été l’activité de recherche entreprise pendant ce temps parallèlement aux enseignements?,etc. Or,les enseignements au niveau universitaire ne se contentent pas uniquement de présenter des acquis, mais doivent aussi envisager des perspectives d’avenir. C’est pourquoi, notre propos ne se limite pas au bilan;il doit, après le constat, ouvrir des voies nouvelles à la réflexion en vue de l’amélioration de ces enseignements. Par exemple, est-ce que d’autres voies d’approche de la connaissance littéraire dans le domaine africain ne sont-elles pas souhaitables?En effet, en parcourant les anthologies existantes sur les littératures africaines, l’on s’aperçoit que celles-ci sont conçues, presque toutes, à partir d’un regard extérieur,d’un prisme eurocentriste. De ce qui précède, redéfinir les finalités de l’enseignement des littératures africaines à l’Université congolaise, réfléchir sur les pratiques pédagogiques de leur transmission, revoir le choix des textes à enseigner, le discours à tenir sur ces derniers, etc., ce sont là autant de questions qui nous interpellent et auxquelles nous essayons de répondre.

 

 

Savoirs et pouvoirs dans l’œuvre d’Emmanuel Dongala.

Boniface Mongo-Mboussa (Université de Paris 13)

 

Dans le champ littéraire congolais, la personnalité d’Emmanuel Dongala détonne. Il est l’un des rares écrivains à avoir très tôt tracé une ligne de démarcation ferme entre le politique et le littéraire. Il fait partie du patrimoine littéraire mondial des écrivains, qui n’ont pas forcément Les Belles- Lettres comme formation initiale. A l’inverse de ses frères de plumes qui sont de culture francophone, il a été formé aux états-Unis.

D’emblée son œuvre frappe par son goût de l’épique, des généalogies et le rapport pouvoir/ savoir le traverse. Déjà son premier roman, Un fusil dans la main, un poème dans la poche, condensé des grandes idées politiques ayant marqué une période de l’histoire africaine : tiers-mondiste, socialisme, négritude, luttes de libération nationale, apartheid pose avec force ce problème. Son deuxième texte(un recueil de nouvelles) : Jazz et vin de palme évoque entre autres l’incapacité de l’intellectuel congolais qui se pique du marxisme à faire une synthèse digeste entre une idéologie née en Occident et le réalité congolaise de la sorcellerie. Son originalité réside justement en ce qu’il n’oppose pas la tradition et la modernité, mais tente de trouver une juste médiation. Problématique qui est au cœur du Feu des origines . Son protagoniste Mankunku né, avec les yeux verts est dès sa naissance fasciné par le savoir. Très tôt il est initié par le Forgeron Lukéni, devient guérisseur et forgeron attitré du village. Quand son pays se modernise grâce à la voie ferrée, il est le premier conducteur du pays. Plus tard il sympathise avec Bunseki Lukeni, un jeune chimiste congolais formé aux états-Unis dans le domaine des réactions moléculaires . Il y’a dans cette rencontre entre un vieux sage africain et un jeune chimiste rompu à la science occidentale, toute la vison de l’Afrique de Dongala.

On se propose ici en s’appuyant sur les travaux de Paulin Houtondji: Les savoirs endogènes (1994), de Barthes : Leçon (1978) et Pierre Marcherey : A quoi pense la littérature (1990) de mettre en exergue cette vison.

 

 

Le Rap à Dakar : un discours populaire et didactique « entre local et global »

Sophie Moulard-Kouka (Université Victor Segalen-Bordeaux 2)

 

A la fin des années 80, le Sénégal a connu l’émergence d’une forme inédite de culture populaire urbaine : le rap. Il s’est rapidement imposé comme le moyen d’expression privilégié d’une jeunesse habituellement privée de parole, et souffrant d’un manque de représentation au niveau politique et social. Par la diffusion d’un message original et accessible à tous, les jeunes citadins participent à la remise en question des modes de connaissance institutionnels de l’école et de l’université. Jouissant souvent d’un bon niveau d’instruction, ils prônent à la fois une meilleure connaissance de leur histoire nationale (et africaine), de leurs langues (ils effectuent notamment des recherches sur le wolof traditionnel et le réhabilitent dans leurs textes auprès d’un public citadin et parlant une langue syncrétique). Ils se servent des moyens de diffusions modernes (radios, TV, Internet, …) pour véhiculer un discours éminemment pédagogique qui initie ce qu’ils appellent la « conscientisation » de la population. Leurs textes se situent au carrefour de l’oral et de l’écrit, et relèvent d’un véritable travail de création littéraire qui joue simultanément sur différents registres stylistiques et linguistiques.

 

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Passion et savoir dans les romans d’Abasse Ndione et Daniel Biyaoula

Bernard Mouralis (Université de Cergy-Pontoise)

 

Auteur de La vie en spirale, dont il existe deux versions sensiblement différentes (NEA, 1984 et Gallimard, 1998) et de Ramata (Gallimard, 2000), Abasse Ndione a écrit une œuvre qui s’apparente au roman policier tel que le concevait Marcel Duhamel. Daniel Biyaoula, de son côté, dans L’impasse (Présence Africaine, 1996), Agonies (Présence Africaine, 1998) et L a source de joies (Présence Africaine, 2003), trace l’image d’un monde désespéré.

Il se pourrait cependant que la préoccupation de ces deux écrivains ne soit pas, en dépit des apparences, le « réalisme », mais, plutôt, la question de la passion. Partant de cette catégorie, traditionnellement associée à la littérature classique, on se proposera de montrer comment elle infléchit dans leurs romans la représentation de la réalité, africaine ou européenne.

L’analyse permettra ensuite de voir comment la prise en compte de la passion dépasse l’expression d’une expérience et débouche sur la mise en forme d’un savoir qui ouvre sur une anthropologie générale, peu intéressée par les différences culturelles.

 

 

La faillite de l’éducation primaire (ou familiale) dans le corpus postcolonial

Florence MOYART (Université Charles de Gaulle-Lille 3)

 

L’Aventure ambiguë relate l’itinéraire spirituel et tragique d’un adolescent qui suit à la fois l’école coloniale et l’école coranique, situation que connurent réellement certains écrivains comme Williams Sassine. A notre avis, les enjeux de l’éducation mis en scène – mis en question – par les romanciers europhones d’Afrique de l’Ouest concernent aussi l’éducation primaire, la transmission des savoirs assurée au sein de la famille. Que peuvent transmettre des parents d’un environnement qu’ils ne comprennent plus ? Et le roman multiplie les illustrations de cette éducation impossible. Les cas si nombreux de stérilité, d’avortement, de mortalité infantile ou inversement d’enfants orphelins marquent un premier niveau, physique si l’on veut, de l’échec systématique de la maternité et de la paternité. Et quand une relation parent-enfant existe, elle est au mieux infructueuse, souvent tragiquement conflictuelle, comme dans Things Fall Apart de Chinua Achebe. Au niveau formel, cette éducation impossible se traduit par l’échec du genre du Bildungsroman ou roman de formation, avec The Famished Road de Ben Okri par exemple. A l’explication sociologique, celle du conflit des générations, à l’explication morale, celle de la perte des valeurs, s’ajoute une explication politique. C’est ce que montre Jacqueline Bardolph dans son article « Azaro, Saleem and Askar : Brothers in Allegory ». Le roman de formation étant aussi, par définition, une allégorie politique, son échec est l’inévitable traduction littéraire de l’absence de perspectives pour les jeunes Nations africaines.

 

L’écriture de l’Université chez Ngandu Nkashama

Joséphine Mulumba (Université de Bayreuth, Allemagne)

 

 

Ngandu Nkashama au lendemain d’un « débat sur l’université » à l’université de Lubumbashi est arrêté, torturé, emprisonné puis relégué au village. Après ces expériences commence pour lui une « vie d’errance ».

Nous allons analyser les œuvres de cet écrivain pour voir comment il dépeint cette institution. Est-elle le lieu du savoir ou le lieu ou le politique a sa main-mise faisant ainsi ce haut lieu de la science une institution au service de la dictature ?

 

 

Du griot, du chasseur et de l’initié, contribution à une étude des stratégies de l’écriture chez les écrivains francophones

David Koffi N’GORAN (Université de Cergy-Pontoise)

 

Cette réflexion se situe sans la perspective de celles ayant cours depuis maintenant une décennie et portant sur les littératures francophones, notamment sur les représentations » nouvelles » qu’elles offrent et qu’on peut également se faire d’elles.

On sait en effet que sous l’impulsion de la sociologie bourdieusienne des champs symboliques un certain nombre de chercheurs a entrepris d’aborder les littératures des pays dominés notamment celles d’Afrique noire et des Antilles françaises en terme de « champ », c’est -à- dire en tant qu’espace spécifique régi par des rapports de forces et pourvoyeur d’un pouvoir spécifique (capital symbolique) traduit par la consécration, la reconnaissance, voire la distinction.

A partir de ce point de vue, il apparaît qu’il est désormais possible d’aborder les littératures des pays dominés en tournant le dos aux anciennes fixités ayant longtemps servi à enfermer les études et la pratique de ces littératures dans des carcans évidemment réducteurs.

Réfléchir aux nombreuses évocations du griot, du chasseur ou de l’initié dans les littératures francophones, c’est à notre avis aborder dans un sens inhabituel le problème du rapport véritable existant entre d’une part littérature et société, puis d’autre part littérature écrite, oralité,et tradition. Mieux, c’est interroger le discours des écrivains (et quelques fois des critiques) sur ces catégories orales et traditionnelles afin de saisir leur statut véritable dans le cadre de la pratique littéraire écrite moderne.

L’avantage de cette approche, c’est qu’elle devra permettre d’apprécier les œuvres non plus en termes de produits communautaires bâtis sur le postulat du groupe, mais en terme d’œuvre d’art sortie du génie du sujet-écrivain, soumis aux « règles de l’art littéraire ».

De ce point de vue, le griot, le chasseur, et l‘initié ne seront plus des items d’identification ou des lieux identitaires des écrivains et de leurs groupes d’appartenance, mais plutôt des éléments évoqués souvent dans le cadre d’une expérience stratégique.

 

 

Italian Translations of African Literature

Cristiana Pugliese (University of Molise, Italy)

[communication présentée en anglais]

 

My paper will be divided into two sections. In the first section I will outline the history of African literature in Italian translation in Italy, from the early translations to the present, in an attempt to determine possible trends and developments. In the second section, I will focus on the Italian translations of selected works of African literature in order to highlight how some translation strategies can reflect cultural differences, while others not only mask, but distort them.

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étude d’un genre : la nouvelle malgache en question(s)

Rondro RAVANOMANANA (Université de La Réunion, France /Université d’Antananarivo, Madagascar)

 

Après le désert littéraire qui a suivi l’indépendance, et plus particulièrement après les événements de 1972 à Madagascar, la littérature malgache de langue française s’est distinguée dans les années 80 sous la forme d’un genre nouveau car peu pratiqué jusqu’alors, la nouvelle… S’il est vrai que cette forme narrative peut s’expliquer par les contraintes éditoriales (publications simplifiées dans les journaux et les différentes revues), il s’avère néanmoins que ce genre bref a aussi permis de dire d’une manière directe et sans détours, voire acerbe, les maux qui traversaient le pays. Il a été le moyen le plus « adéquat » semble-t-il pour transcrire la réalité sociale en se caractérisant par ce que nous appelons « l’écriture de la quotidienneté ». Bien plus qu’une « aubaine », le choix de la nouvelle s’est révélée être la thématisation d’un combat et d’une révolte dont l’expression était par ailleurs mise en exergue par les contraintes du genre. Il s’agira pour nous de nous interroger sur l’association du genre littéraire et du discours dans la littérature malgache de langue française : dans quelles mesures cette forme narrative particulière a-t-elle permis à cette littérature non seulement de sortir de l’ombre, mais aussi et surtout de lui donner cette vigueur nouvelle s’apparentant au souffle primordial de sa « renaissance ».

 

 

édition, traduction, enseignement : le rôle nécessaire de la philologie dans l’enseignement  des  littératures de  l’Afrique

Alain Ricard (CNRS / LLACAN)

 

Enseignons nous la littérature ou l’histoire de la littérature? Pour ma part, la réponse est claire: j’enseigne l’histoire et la sociologie des littératures. Dans le cas africain ce projet intellectuel présente une difficulté particulière. Les ouvrages de vulgarisation ont précédé les travaux de recherche et produit des habitudes de classement et de lecture qu’il convient d’interroger, voire de démonter. Ce travail propre d’enseignement consiste, dans mon cas, à éditer et à traduire, ou faire traduire, des textes qui élargissent le « canon » littéraire, c’est à dire l’ensemble des textes que l’on peut enseigner dans un cours d’histoire de la littérature,- qui ne se limite pas au roman! Je pense en effet que la répétition inlassable de travaux, relevant le plus souvent de l’explication de textes, sur quelques auteurs masque complètement la richesse et l’intérêt des productions verbales africaines; pour moi le travail du professeur ne se sépare pas de celui du chercheur et consiste à publier et à interpréter des oeuvres laissées de côté, a suggérer en permanence de nouvelles perspectives, qui libèrent l’interprétation des carcans de la tradition ou de la mode!

 

 

Le savoir colonial dans les littératures africaines

János Riesz (Université de Bayreuth, Allemagne)

 

La littérature africaine en langues européennes est née dans un contexte colonial et, dans un processus difficile et laborieux, s’est constituée contre l’énorme masse de la littérature (fictionnelle et autre) coloniale. Le writing back semble être le trait distinctif de cette littérature, au moins de la première et de la deuxième génération de ses auteurs. Or, Karim, le protagoniste du roman homonyme d’ Ousmane Sembène (1935) se fait prêter « des romans intéressants qui parlaient d’un pays qu’il connaissait et de personnages qu’il voyait autour de lui », et il donne des titres tels que La Randonnée de Samba Diouf des frères Tharaud et Le Roman d’un Spahi de Pierre Loti. A l’époque, cette littérature faisait donc partie du champ de la littérature africaine. Avec la naissance d’un champ autonome de littérature africaine en langue française (depuis les années 1950 env.), la littérature coloniale se voit de plus en plus exclue de ce champ commun. Le jeune Mongo Beti, dans son premier roman (Ville Cruelle, 1954) polémique plus d’une fois contre « les explorateurs, les géographes, les journalistes » de l’âge colonial. Faut-il pour autant exclure de nos études de littérature africaine cette littérature de l’époque coloniale et le « savoir » qu’elle véhicule ? Des auteurs comme R. Delavignette, R. Randau et d’autres ont pourtant donné une vision de la société coloniale qu’il serait imprudent d’exclure de nos recherches. Ma communication se propose donc de développer une réponse à la question : dans quelle mesure faut-il intégrer la littérature coloniale et son « savoir » dans les études et l’enseignement de la littérature africaine ?

 

 

Es’kia Mphahlele : un ‘pédagogue incorrigible »

Richard Samin (Université de Nancy 2)

 

Es’kia Mphahlele (1919-) est un écrivain sud-africain majeur qui a consacré une grande partie de sa vie à l’enseignement de la littérature. Depuis qu’enfant il découvrit la langue et la littérature anglaise il sut qu’il serait écrivain et professeur de littérature. Tout au cours de sa longue carrière, qui le conduisit à enseigner dans plusieurs pays africains et aux états-Unis, il n’a cessé de réfléchir sur le rôle social de la littérature et de défendre les valeurs qu’elle porte. Mais c’est bien sûr la littérature sud-africaine qui fait l’objet de toute son attention.

Le but de la communication consistera à analyser en fonctions de quels critères et par quelles voies E. Mphahlele a été conduit à considérer la littérature et l’enseignement de la littérature comme des actes culturels essentiels pour donner sens et cohérence à la société sud-africaine prise dans le flux de changements historiques.

 

 

La Richesse de la magie naturelle dans la littérature antillaise

Mari Carmen Serrano Belmonte (Universidad de Alicante, Espagne)

 

Lorsque l’on pense à la littérature antillaise, il est vraiment inévitable de reconnaître qu’elle se rapporte, de manière directe, à un monde où la magie et le surnaturel deviennent des axes essentiels dans une écriture où les personnages de romans tels que Télumée (Pluie et Vent sur Télumée Miracle), agissent telles que de vraies « porteuses de savoirs », ce qui est démontré à travers l’usage qu’elles font de la magie grâce à un monde végétal, truffé de plantes douées de propriétés miraculeuses qui re-tricotent tout un paysage merveilleux. Les écrivains « femmes » sont, sans aucun doute, celles qui, dans l’ensemble de cette littérature caribéenne, nous  transmettent un monde ainsi qu’une réalité tout à fait inconnue aux yeux d’une société occidentale qui se montre de plus en plus captivée par cette atmosphère si charmante et chaleureuse.

 

 

études africaines et interdisciplinarité : réflexions théoriques et retour sur des pratiques

Jean Sevry (Université de Montpellier)

 

Montrer dans une première partie, sur un plan général et théorique, la nécessité d’une approche interdisciplinaire en termes de sciences humaines (école de Francfort, G. Alport, école de Genève, J. Piaget, Edgar Morin). Dans le cas très particulier des littératures africaines, la complexité même de l’objet rend impossible une approche mono-disciplinaire. Nos approches critiques devront donc venir s’enrichir au contact de l’anthropologie culturelle, de l’histoire et de l’ethnolinguistique.

Dans un deuxième temps, je compte faire un bilan d’une expérience concrète menée pendant 7 ans à Montpellier, à l’occasion d’un DEA d’études africaines interdisciplinaires : aspects positifs, difficultés institutionnelles et théoriques.

 


L’Expression des savoirs dans la littérature burkinabè

Alain Sissao (Institut des Sciences des Sociétés / Centre National de la Recherche Scientifique et Technologique du Burkina Faso)

 

La littérature écrite burkinabè est une littérature en émergence. Depuis la parution du premier roman burkinabè Crépuscule des temps anciens de Nazi Boni en 1962 à l’éclosion des écrivains de la nouvelle génération dans les années 90, on sent que la littérature burkinabè devient au fil du temps un réceptacle de savoirs anciens et nouveaux. Ainsi les écrivains se forgent une nouvelle personnalité tout en puisant dans la veine de l’oralité l’essentiel de leur inspiration.

Nous tenterons de montrer en quoi la littérature burkinabè est porteuse de savoirs qui sont avérés ou fabriqués (forgés) et comment ils sont organisés.

Nous verrons comment s’exprime les divergences (conflits) et convergences à travers le champ des détenteurs de savoirs.

Enfin nous nous interrogerons sur les différents genres (essai, roman, poésie, traité) pratiqués dans la littérature burkinabè pour montrer les relations (l’intertextualité) qui y sont entre-tenues avec d’autres types ou formes de discours (le discours politique, le discours philosophique, le discours anthropologique, le discours historique. Au total, notre travail montrera les fondements sous jacents de la littérature burkinabè.

 

 

La sagesse au cœur du “mbooku”, poésie traditionnelle du Cameroun Septentrional

Isaac-Célestin TCHEHO (Université de Yaoundé I/Ministère de l’Enseignement Supérieur)

 

Le « mbooku » est un genre poétique de la littérature traditionnelle des Peuhls du Cameroun Septentrional. La sagesse y occupe une place tellement importante qu’il ne serait pas exagéré de l’assimiler à un genre sapiential au même titre que le proverbe.

Le monde est confronté au défi de résorber le déficit de sagesse qui entrave le progrès. Tel est à peu près ce que le « mboojo » (le poète), illustre à travers les divers récits constitutifs du « mbooku ».

L’analyse dégagera les procédés de mise en texte de cette problématique éminemment actuelle et s’interrogera sur les choix à opérer, au niveau de la didactique des genres, pour placer à ce genre littéraire à la place qu’il mérite dans les programmes des études littéraires et para-littéraires de l’Université camerounaise où il est question de promotion de l’éthique et des valeurs de citoyenneté responsable.

 

 

Pédagogie du roman et roman de la pédagogie

Katell Thébaudeau (Université Laval, Québec)

 

La communication se propose de montrer comment le roman, pour Mariama Bâ, Calixthe Beyala et Ken Bugul, est le lieu privilégié de l’exploration sociologique, de la réflexion sur les valeurs et les interdits sociaux. Les trois romancières déploient toute une poétique par laquelle leur praxis littéraire actualise le sujet féminin africain. Elles investissent toute pratique discursive (autobiographie romancée, confession épistolaire, journal intime, reportage journalistique, essai, transcription d’un “art d’aimer” gastronomique, etc.) susceptible de les aider à formaliser et à transmettre un modus vivendi. Dans le même temps, se dessinent la puissance et le rôle répressif du roman (qui se pose en institution) dans la production et la légitimation littéraires, exerçant sa juridiction à un point précis de la chaîne qui permet l’entrée d’un écrit (ou d’un écrivain) dans l’histoire, garantissant du même coup la conservation de ce qui peut encore s’appeler norme pour le contrat social.

 

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Entre les traditions et le quotidien vécu : les frictions d’un monde en mutation

Nazaré Torrão (Université de Genève)

 

Je me propose de traiter la façon dont sont vues dans la littérature du Mozambique les traditions culturelles et leur actualisation dans le vécu quotidien du pays. Mon analyse portera sur la comparaison de deux auteurs, Mia Couto et Paulina Chiziane. Le premier envisage la transmission des savoirs traditionnels à la nouvelle génération comme la solution pour évoluer en maintenant la spécificité culturelle et comme moyen de construire le ciment de la mozambicaneité future. La deuxième crée des intrigues dans le milieu citadin, parmi des gens de culture occidentalisée qui s’adonnent à des pratiques culturelles traditionnelles. Ses fictions interrogent ainsi les pratiques et les savoirs anciens en même temps que le modus vivendi occidental, leurs points de contact et de friction, en développant des solutions créatives et respectueuses des différents savoirs.

La communication visera à interroger le rôle de la littérature dans la transmission et (re)création des savoirs.

 

L’enseignement des littératures francophones dans le secondaire

Vanessa Vaudin (Université de Cergy-Pontoise)

 

Ma proposition d’article concerne l’enseignement des littératures francophones qui est prodigué dans les établissements secondaires français.

Grâce à deux enquêtes menées auprès des acteurs de l’école, qui sont les professeurs et les élèves, ainsi que par un examen des données officielles de l’éducation Nationale et du milieu éditorial, je veux démontrer que les littératures francophones, à l’heure actuelle, ne sont presque pas enseignées ni même connues parfois dans le secondaire et que, si elles le sont, ce n’est qu’enfermées dans une périphérie, qui ne leur donne en rien leur part entière dans la littérature française.

 

 

Les études de la littérature africaine – défi ou défaut ?

Flora Veit-Wild (Université Humboldt, Berlin)

 

Longtemps les études de la littérature africaine ont été regardées comme un défaut, une « non-discipline », valant seulement comme auxiliaire pour la linguistique ou l’ethnologie. Il n’y que récemment qu’elles ont acquis un profil comme discipline propre et comme telles peuvent constituer un défi pour d’autres disciplines des Africanistes eux-mêmes.

Je vais esquisser le développement des études et de l’enseignement de la littérature africaine en Allemagne dès les débuts et dans les contextes politiques changeants : comme aspect marginal de ce qu’on appelait « Afrikanistik » dans le cadre de l’entreprise coloniale ; son développement différent dans l’Allemagne de l’Est et de l’Ouest de 1945 à 1989 ; et puis la situation actuelle dans les de divers affiliations interdisciplinaires.

Le défi que la littérature africaine pose pour moi est de la percevoir comme littérature moderne qui prend sa place entre les autres littératures post-coloniales du monde et demande  à être analysée selon les méthodes d’autres humanités. Comme telle, elle a de multiples connections avec des disciplines voisines (littératures anglophones, francophones, linguistique, sociologie, « gender studies », « cultural studies », ethnologie, etc). En plus, elle lance un défi aux Africanistes et les provoque à abandonner l’image devenue obsolète d’une Afrique exotique, n’intéressant que des spécialistes un peu fous.

 

 

Pour une didactique de la parémiologie:le cas des littératures africaines du golfe du Bénin

Jean-Norbert Vignondé (CELFA, Université Michel de Montaigne-Bordeaux 3)

 

L’étude de l’effet des proverbes dans les productions littéraires africaines appelle une analyse qui devrait pouvoir aller au delà de la simple identification de ces éléments et leur traduction dans le texte.

Dans l’aire francophone du golfe du Bénin, la spécificité de ces « éléments de style » rend impropre le terme même de « proverbe » et rappelle plus adéquatement celui du « paremios » grec.

Le critique ne saura rendre compte de cette composante comme élément constitutif du style d’un texte qu’en maîtrisant la particularité de son esthétique dans la culture orale qui l’a généré, et son mode de fonctionnement à l’intérieur du discours oral.

 

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La littérature comme instrument pédagogique : le roman populaire ghanéen et l’œuvre d’Ayi Kwei Armah.

Philip Whyte (Université de Tours)

 

La prise de conscience en Occident de l’existence d’une littérature africaine d’expression anglaise coïncide avec l’émergence en Europe de théories littéraires mettant progressivement en cause ce que Roland Barthes appelle la « transitivité » de l’œuvre littéraire, à savoir son utilisation à des fins didactiques. L’œuvre se doit d’être autotélique comme si son degré de littérarité se mesurait en fin de compte à l’aune de son inutilité pragmatique. Dans la mesure où l’art traditionnel africain, y compris dans sa fonction pédagogique, ne saurait être dissocié de la vie quotidienne, nous comprenons le ton à la fois défensif et exaspéré emprunté par Chinua Achebe en 1964 lorsqu’il tenta, devant un Occident sceptique, de justifier sa fonction de romancier/pédagogue.

A partir des écrits des romanciers populaires ghanéens ainsi que de l’œuvre « sophistiquée » d’un auteur à la réputation internationale (il s’agit d’Ayi Kwei Armah), je tâcherai de démontrer les enjeux à la fois esthétiques et idéologiques qui découlent des tensions ainsi décelables entre des conceptions très différentes de la littérature.

 

 

Savoir, souvenir, superstition ou discours collectif? Quelques fissures dans des identités post-apartheid de charactères sudafricains dans les films A Reasonable Man (1999) et The Day of the two suns (1999)

Janina Wozniak (Univ. Port Elizabeth, Afrique du Sud)

 

Le long-métrage A Reasonable Man soulève des questions quant aux identités sud-africaines dans le drame judiciaire autour d’un jeune berger zoulou rural qui a tué un bébé, convaincu que c’était un méchant esprit, le « tikoloshe ». Son défenseur est un avocat blanc qui avait dû participer à la guerre en Angola pendant les années ’80. Le corps du jeune blanc prend lui-même connaissance du pouvoir guérissant d’une sangoma (marabout) qu’il avait demandé d’aider l’accusé, tandis que les professionnels noirs à la Cour de Justice tentent d’échapper à leur « tradition de superstition » par l’identité urbaine, moderne et occidentale.

La même identité africaine moderne est mise en question dans le film The Day of theTwo Suns. Dans celui-ci, le réalisateur essaie d’identifier les répercussions du massacre des bœufs en 1856-57 par les Xhosa, ayant écouté la jeune prophetesse Nongqawuse qui promettait le retour des ancêtres avec d’immenses richesses si le peuple détruit toutes ses moyens d’existence, cela veut dire, les bœufs et les granges. Ce quasi-suicide national avait livré les Xhosa aux colonisateurs anglais. Les légendes toujours courantes chez le peuple Xhosa sont mises en question par une jeune juge noire et par plusieurs témoins sud-africains d’ethnies et de professions différentes.

Je tenterai de montrer que les nouvelles identités sud-africaines modernes sont construites sur des synthèses de nombreuses influences historiques, politiques, culturelles et sociales. Elles y sont soumises à deux approches critiques qui se complémentent: d’abord la mise en question de conventions d’identité individuelle, et ensuite une procédure judiciaire moderne occidentale (selon le modèle du drame populaire de cour judiciaire à la télévision). Donc, les metteurs en scène s’engagent à la fois comme porteurs de savoir, et ainsi ils invitent à remettre en question les opinions communes sur le « contrôle » de certains « contes historiques » et du « système judiciare » par certains groupes ethniques du pays.